Une image de la réalité d'une petite ville varoise amoureuse de son patrimoine et de ses racines, qui a su préserver ses espaces naturels et ruraux... Il y a des endroits comme celui-ci où il faut faire abstraction de très peu d'éléments pour imaginer ce qu'était autrefois le paysage.
Voici un endroit que j'aime particulièrement à Ollioules, ma ville : ces vieux jardins qui bordent la rivière aux portes du centre historique. Attestés depuis au moins le Moyen Age, ils ont survécu aux vicissitudes de l'histoire. On les appelait autrefois "horts" ou "gerdrin" en provençal maritime ancien. Attention, ce ne sont pas des jardins d'agrément : le jardin autrefois, c'est l'endroit où on cultive fruits et légumes, et ce qu'on appelle les "herbes", à la fois aromates, herbes médicinales, bien sûr, mais aussi légumes tels que les "lachugo" (les laitues). Ceux-ci se trouvent dans le quartier de la Bonnefont, où le seigneur d'Ollioules lui-même avait son jardin qui alimentait le château en fruits et légumes frais. Ce sont des parcelles relativement restreintes, séparées par des murs de pierre plusieurs fois centenaires et alimentés en eau par un système de canaux et de citernes. Un lieu magique, dans lequel on retrouve ce que les textes anciens nous décrivent, où mes vieux amis les registres de cadastres anciens prennent une forme concrète... Je m'assieds parfois sur le muret que vous voyez au premier plan, et j'admire en silence, je me prends à rêver, dans une sorte de communion silencieuse avec toux ceux que je croise dans les documents d'archives...
Au-delà du mur de gauche, le lit de la Reppe, petit fleuve côtier qui traverse les faubourgs de la ville, puis l'ancien jardin des soeurs Ursulines, devenu... un parking ; lui n'a pas survécu. Au-dessus des grands arbres, on aperçoit les ruines du château féodal, avec le sommet du logis seigneurial. Et la colline que vous apercevez au fond, c'est l'extrémité est du massif du Gros Cerveau, qui nous protège des vents froids ; autrefois, ses pentes étaient entièrement couvertes de restanques, ces terrasses de culture dont subistent de nombreux vestiges. Aujourd'hui, ces pentes sont retournées à la nature, seuls de vieux murs de pierre sèche rappellent le dur labeur des hommes durant des siècles, et quelques vieux oliviers, lauriers, amandiers, qui refusent de mourir...